Est-ce que le mot umami vous dit quelque chose ? D’après mes lectures, ça veut dire «goût savoureux», en japonais. C’est la cinquième saveur, reconnue en 1985, après le sucré, le salé, l’amer et l’acide. L’umami est naturellement présent dans les produits fermentés et vieillis, tels que les fromages. Il se manifeste par un arrière goût doux et prolongé en bouche. Provoquant la salivation, il stimule la gorge, enrobe le palais et la langue et active ainsi les récepteurs du goût de notre cerveau. Rien que pour vivre l’umami, ça vaut la peine de développer notre sensibilité gustatif du fromage. C’est plus qu’une question de préférence, c’est aussi scientifique !
Ainsi, le goût du fromage va varier selon la durée de son affinage et les conditions de garde, la race laitière, son origine et le travail du fromager lui-même. Il faut se rappeler que ce sont les religieux qui ont mis au point la fabrication du fromage en Europe dès le Haut Moyen-Âge. Au Québec, les moines d’Oka (1883-1975) et ceux de L’Abbaye de Saint-Benoit-du-Lac (1943-2017), dans les Cantons de l’Est, ont donné le coup d’envoi à la grande production fromagère. Les religieuses grecques du Troupeau Bénit, qui fréquentent nos marchés, poursuivent la tradition. Quoiqu’il en soit, à la fin d’un repas, selon le menu, il est intéressant de servir à ses invités un beau plateau de fromages, de trois à sept différents. Pour un plateau de trois, on choisira une pâte dure (pressée, cuite ou non cuite), une pâte molle, une pâte persillée. J’aime bien, aussi, quand l’occasion se présente, acheter une petite meule entière, bien à point, au maximum de son goût et la servir seule pour en savourer toute la richesse. Là-dessus, je me laisse volontiers guider par l’artisan ou par le conseiller dans une bonne fromagerie. Les restaurants devraient être également un lieu de choix pour mieux apprécier, sinon découvrir le fromage, comme on le fait avec le vin. Je ne sais pas si dans les écoles hôtelières les élèves reçoivent une bonne formation sur la fabrication du fromage, en particulier sur les fromages d’ici. Si c’est le cas, on devrait pouvoir trouver dans les restos de belles variétés bien à point, choisies par le chef et présentés avec compétence par un serveur autant que possible passionné et aguerri. Autre accord important : celui du vin et du fromage. Sur ce point, les us et coutumes ont évolué. Les vins blancs sont souvent préférés aux rouges. Grâce à leur richesse aromatique, ils subliment la saveur des fromages, sans la masquer par une attaque tannique trop puissante. On voit aussi, de plus en plus, la dégustation de fromages s’accompagner de grands whiskys, de vins doux, de saké, de cidre, même de thés et de bières. Évidemment, il vaut mieux se faire conseiller par un expert pour vraiment réussir ces accords. On peut pareillement accompagner le fromage de fruits frais ou secs, de confiture, de miel, d’un petit chutney, pour équilibrer les notes lactiques et éveiller des saveurs cachées.
N’oublions pas que fromage a aussi cette rare qualité alimentaire de permettre une dégustation instantanée, à toute heure de la journée. Cela dit, pourquoi, encore là, ne pas aller vers l’artisan dans les marchés, au lieu de se fier à des emballages aguicheurs qui ne contiennent pas toujours ce qu’il y a de mieux.
Je termine ici ma trilogie sur les fromages. Le mot d’ordre reste : continuons à cultiver notre passion pour nos fromages québécois, afin que cette belle tradition se développe autour d’un terroir d’ici, en qualité et en quantité. Et ça, c’est une belle responsabilité, en tant que personne, que parent, que citoyen.
Diane Seguin

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